Il faudra un jour écrire un manuel de l'ingéniosité grecque à narguer les oppresseurs, ces trésors de ruse déployés pour signifier aux Turcs, aux Italiens, aux Allemands, qu'une vie terrestre ce n'est rien, une seconde à peine, avant le retour de la liberté.
Michel Déon - Le rendez-vous de Patmos
La "capitale" de Corfou, Kerkyra, a bénéficié de nombreuses protections, parfois pesantes. Ainsi, malgré un périmètre restreint, cumule-t-elle deux forteresses, une "vieille" qui n'a jamais été prise par les différents envahisseurs qui repartaient au bout de quelques jours, ou quelques mois, rageurs, dans leur pays d'origine et une "nouvelle", encore un peu occupée par ces gens de la marine qui pourtant ne se montrent guère.
Entre les deux, il y a les musées : celui d'art asiatique dans le palais populaire de St Michael et Georges, entouré de promenades et de jardins au dessus de la mer et celui d'art religieux byzantin, à l'église de Panagia Antivouniotissa, en retrait mais toujours sur le bord de mer. Le musée archéologique, lui, est fermé depuis plusieurs années, au grand scandale de tous les amoureux des vieilles pierres : on ne peut donc plus y voir la gorgone du fronton du temple d'Artémis ni aucun des fragments retrouvés sur l'île des Phéaciens.
Avec ses peintures murales pâlies par le soleil flamboyant :
Son puits vénitien, au coeur d'une place secrète, conservera son côté mystérieux qui nous fait pour un instant entrer dans une histoire magique de Corto Maltese...
La vieille forteresse se visite, est en bon état et regarde du côté du continent, de l'Epire, d'un petit air goguenard. Aujourd'hui en son sein ne restent que certains anciens bâtiments encore debout parmi tous ceux érigés selon les époques et les besoins de défense ou de démonstration de puissance, et l'église Agio Giorgious, qui ressemble à un temple à s'y méprendre. A noter qu'aujourd'hui, l'école de musique de Kerkyra est abritée dans un des bâtiments qui donne directement sur la mer, on peut donc y entendre des batteries effrénées ou des claviers lancinants, le soir juste après la fin de la récré.
Le nouveau fort est moins beau mais on peut aussi y monter, gratuitement, pour y admirer la vieille ville qui s'étale à ses pieds. Dans tous ses ocres, ses jaunes et ses blancs, elle s'étire et se laisse admirer, paresseuse, comme un chat.
La décrépitude des façades ne se voit que de près et les clochers rouges se dressent fièrement au milieu des toits de tuiles.
On parle de clochers mais comme partout en Grèce, les cloches des églises sont à part, à côté. On remarque d'abord les cloches, toujours en premier, et ensuite l'église, trop souvent engoncée dans d'autres maisons, dans des coins de rues improbables ou rencognées sur elles-mêmes. En Grèce, l'église fait partie de la vie quotidienne, il faut s'y faire.



La décrépitude des façades ne se voit que de près et les clochers rouges se dressent fièrement au milieu des toits de tuiles.
On parle de clochers mais comme partout en Grèce, les cloches des églises sont à part, à côté. On remarque d'abord les cloches, toujours en premier, et ensuite l'église, trop souvent engoncée dans d'autres maisons, dans des coins de rues improbables ou rencognées sur elles-mêmes. En Grèce, l'église fait partie de la vie quotidienne, il faut s'y faire.
L'indolence n'est ici qu'une apparence, il faut juste se caler aux heures
les plus chaudes, où personne n'aurait l'idée de travailler. On se lève
tôt le matin, on vaque à ses affaires jusqu'à midi, ensuite on ferme
jusqu'à 5 heures. Et puis tout se réveille et s'agite jusqu'au petit
matin...
Les balades sont tranquilles et longues, comme l'île : on va du vieux port à la pointe d'Anemomilos où un moulin en panne veille sur les baigneurs du soir ; on part se faire peur au pied de la piste d'atterrissage, en face du Pantokrator qui veille, en guettant les avions qui descendent sur la presqu'île de Kanoni pour atterrir sous notre nez ; on retourne au vieux port en croyant que c'est le nouveau mais le nouveau, plutôt ancien, est encore un peu plus loin, du côté de la nouvelle forteresse, très vieille finalement. Mais quelle importance ?
Car on finit toujours par se retrouver le nez devant l'épicier-fruitier, ouvert 24h/24h, qui pratique des prix incroyablement bas sur les produits de première nécessité comme les olives, les tomates et les kumquats, spécialité qui sert de base à de multiples gourmandises corcyriennes.

Car on finit toujours par se retrouver le nez devant l'épicier-fruitier, ouvert 24h/24h, qui pratique des prix incroyablement bas sur les produits de première nécessité comme les olives, les tomates et les kumquats, spécialité qui sert de base à de multiples gourmandises corcyriennes.
Et le soir, les centaines d'hirondelles qui crient et tournoient au dessus des toits, jusqu'à l'heure du calme, de la sérénité nocturne...
Quelques jours à Corfou, à pied ou en bus qui vous transporte partout pour pas cher, avec toujours la compagnie Ktel, sorte de coopérative nationale, à la grecque, performante et organisée, du moment qu'on se cale sur ses horaires et qu'on trouve l'arrêt de bus, lui aussi toujours improbable et pourtant tellement évident... Des vacances qui réconcilient l'âme avec le coeur.
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