mercredi 17 septembre 2014

Florence, musée ouvert


Au-delà des situations inconcevables et autres errements géographiques du best seller américain Inferno, dont l'histoire démarre à Florence, capitale de la Toscane médiévale et contemporaine, chef d’œuvre de la Renaissance et de l’art italien, voici de véritables petites taches de couleur, souvenirs étoilés d’un séjour trop court.

1/ Le choc du Duomo
Même si on ne se rend pas tout de suite compte de la coupole de Brunelleschi, majestueuse, ronde, magnifique. Même si la façade est un peu masquée par le Baptistère, couvert, manque de chance, par un échafaudage transparent qui laisse heureusement entrevoir ses beautés cachées, il est toujours curieux de regarder l’effet sur les visages de ceux qui le découvrent pour la première fois, impression de découverte du bout de la rue, le Duomo de Florence : c’est toujours saisissant, les yeux toujours admiratifs, incrédules, se lèvent et n’en croient pas… leurs yeux. Rayé de blanc, vert et rouge, sculpté de tous côtés, flanqué d’un campanile vertigineux, découvrir le Duomo est un choc dont on ne se remet pas. 

 2/ Le Baptistère
Et le baptistère alors, me direz-vous ? L'air de rien, on entre sans trop savoir ce qu'on va y trouver. On est encore sous l'écrasante majesté de la cathédrale en face. Et dès qu'on est dedans, on ne sait plus où donner de la tête : toujours ces colonnes marbrées vertes et blanches, la lumière qui tombe en oblique des fenêtres inaccessibles pour le commun des mortels, dont hélas on fait partie. Et des mosaïques dorées, des figures d'archanges, d'enfer, des scènes bibliques, des adorateurs et des prêcheurs, des anges et des diablotins mangeurs d'hommes, maudits.
Et ce Christ, enfin, le seul qui ne porte pas tout le poids des péchés du monde, le seul qui semble heureux, serein, rayonnant. En fait, une fois qu'on y est entré, on n'a plus du tout envie d'en sortir.

 3/ la Porte
A Florence, les artistes reconnaissent le génie des autres. Pas toujours, d'accord, mais enfin, plus qu'ailleurs. Il faut dire qu'ils sont légion, à avoir embelli la ville au fil des époques... Et donc Michel-Ange, qui n'avait pourtant besoin de personne, est venu admirer la porte est du baptistère réalisée par Lorenzo Ghiberti et l'a trouvée tellement belle qu'elle était digne d'être celle du Paradis. Giorgio Vasari, lui, estimait que c'était le plus beau et le plus parfait chef d'oeuvre de l'art sur cette terre. La porte du Paradis (une copie, la vraie est à l'ombre du Museo dell'opera del Duomo) est visible par tous, on peut y passer des heures. Ou alors il faut -déjà- penser à y revenir.
 4/ Attention chef d'oeuvre
Puisqu'on est dedans... Michel-Ange a t-il fait autre chose que des chefs d'oeuvre ? A Rome, non. Et à Florence non plus : le David trône depuis 500 ans sur la piazza della Signoria devant le Palazzo Vecchio (oui je sais : l'original a été mis à l'abri dans la Galleria dell'Academia à quelques centaines de mètres de là, je vous invite à suivre pas à pas l'itinéraire du transport de la statue dans les rues de Florence, qui a eu lieu à la fin du XIXème siècle sous l'air béat des badauds, ce même air qu'on voit sur tous les visages des touristes lorsqu'ils lèvent les yeux vers David) et il ignore superbement le grand Neptune qui le regarde méchamment. Pour changer, on peut aussi le voir, magnifique, en "vrai" avec tous ses contemporains ou presque, au moins ceux qui ne sont pas au Louvre. L'esquisse de Saint Mathieu est impressionnante dans le sens où, effectivement, on voit émerger de la pierre un corps, déjà formé mais pas fini, la création humaine sans avoir besoin du divin.
 5/ Nus sous la pluie
Oui, ils sont là, nus sous la pluie, le soleil et la lune, chaque jour depuis des siècles. David regarde au loin, vers le couloir des Uffizzi et son regard n'accroche même pas les statues disséminées dans la Loggia dei Lanzi, où chacun s'abrite de la chaleur et tente de faire des photos originales malgré les cerbères qui aboient à chaque faux pas. Persée, l'Enlèvement des Sabines... et si on s'intéresse un tant soit peu à chacune de leur histoire, force est de reconnaître le talent de ces artistes qui ont tout donné à leurs créatures, à leurs créations. On ne reste pas de marbre devant cette Méduse de bronze qui s'affiche, béante, devant tous et qui a tant coûté à Cellini, forcé de tout jeter dans le fourneau pour que ce satané bronze puisse en sortir, perfetto.
6/ Incognito
Je ne parlerai pas de la galerie des Offices et des peintures qu'elle recèle. On trouve n'importe où son histoire. Encore que, n'est-ce-pas, recevoir en cadeau de mariage la Vénus d'un certain Sandro Botticelli pour orner sa chambre à coucher, ça révise facilement toutes les théories anti-noces.
Mais il est à Florence d'autres musées bien moins connus, bien moins fréquentés alors même que des trésors s'y cachent. Le musée du Bargello fait partie de ceux-là et l'avantage, c'est qu'on n'y fait pas la queue pour y entrer, pour y voir, immédiatement et sans pitié, le Bacchus ivre de Michel-Ange, joufflu et attendrissant. D'autres Bacchus lui tiennent compagnie mais sans comparaison. Le Bargello est un musée sans prétention qui a joué des tas de rôles différents dans l'histoire de la ville, de palais à prison, aujourd'hui abri de Donatello et autres artistes majeurs de la Renaissance. Un havre de paix. 

7/ Palazzo Palazzi
A Florence, en matière de palais, on est servi. Il y en a à tous les coins de rue. Des qui ont changé de fonction, des qui sont encore des palais, avec des bancs de pierre qui courent tout le long de leurs façades ocrées, pour que les gens puissent s'y asseoir et s'y reposer, et attendre ceux qui font, encore, des photos. On en aime certains, d'autres pas. 
 
A mon avis, le Palais Pitti, grande masse carrée, n'arrive pas à la cheville du Palazzo Vecchio, bien plus biscornu mais tellement plus chargé d'histoire. On s'y perd, on s'émerveille, on est dans un labyrinthe de pièces grandes et petites, toutes avec "quelque chose". A Pitti, tout est pareil et on défile d'une pièce à l'autre sans s'en apercevoir. Heureusement, il y a les peintures. Hélas, il y a le Giardino de Boboli. Il n'a de jardin que le nom, c'est plutôt une série d'allées caillouteuses bordées de statues. Oui, bien entendu il y a des arbres mais bon, en fait on ne dirait pas. Bref j'ai pas aimé l'un et beaucoup aimé l'autre, qui n'a pas de jardin mais des balcons, des loggias, des chambres, une salle des lys, un studiolo et une salle des Cinq Cents d'où, du plafond, nous regarde le grand Cosme 1er, droite lignée des Medicis.

8/ Les Medicis
Ah la famille Medicis ! De Rome et Florence, de Paris à Edinbourg, il y en a eu tant, des grands, des magnifiques, des papes ou des cardinaux, des Catherine qui ont su régner sur la France en prenant le temps d'y imposer certaines manières en introduisant l'usage de..la fourchette ! Des Laurent qui se sont entourés des plus talentueux artistes, détectés dès leur plus jeune âge. Des grands politiques et des meneurs d'hommes. Et puis aussi, une famille qui a connu des revers, des trahisons, des peines, des peurs... et qui a marqué non seulement la Renaissance florentine mais encore bien longtemps après, a laissé des traces dans la ville. Le corridor Vasari, long couloir fermé qui court du Palazzo Vecchio au Palais Pitti en passant au dessus du Ponte Vecchio est encore là pour en témoigner : c'étaient eux les maîtres de Florence.
Je ne vais pas insister sur l'histoire des Médicis, ils sont presque tous dans les livres d'histoire. Plutôt, j'aimerais vous narrer l'histoire de leur jardinier, mais chut...
9/ Fresques, Cloîtres, Chapelles
On n'en finit pas d'entrer dans les églises, qui sont toutes plus belles les unes que les autres. Qui n'ont rien à voir avec celles que l'on connaît en France, grises, froides et poussiéreuses. En Italie, en Toscane, elles sont chaudes, claires et lumineuses pour qu'on voie mieux les détails des peintures murales dans les chapelles, les sculptures sur les colonnes colorées, les dessins entrelacés de marbres.


La vie est là, ce ne sont pas des choses mortes comme on en a l'habitude ici. Chacune a son histoire et il y a eu des scènes tragiques dans toutes. Galilée, Dante sont passés là. Rossini y a son tombeau. Les fresques racontent la vie de tous les jours, lorsqu'elles n'ont pas disparu lors de l'inondation de 1966 qui fit tant de dégâts.
 Un cloître vert, une chapelle espagnole, l'Enfer de Dante et les clefs du paradis : voilà Firenze.

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