dimanche 30 septembre 2018

Violetta, en fashion victim ?

Pour cette représentation, co-production Toulouse/Bordeaux de la Traviata, on plonge directement dans le monde de la haute couture. Avec un Franck Sorbier en costumier-couturier, qui a joué non pas sur du velours mais sur les camélias transfigurés. Une dégringolade de camélias, noirs, rouges ou blancs mais partout. D'abord sur les toilettes de Traviata, noire et blanche, puis noire, enfin rouge et pour terminer, blanche diaphane avec une seule tache rouge au milieu de tout ce tulle qui s'envole.

Les costumes sont donc somptueux, soit. Mais hélas, cela écrase un peu la dramaturgie, ça éloigne le sentiment, ça décale l'intention. On y croit mais qu'un peu, à ce drame qui se joue sur fond de méditerranée, pin parasol, piscine bleutée et costumes impeccables. Cela ne pourrait être qu'une intrigue banale au sein de la jet set, qui s'amuse et joue en toile de fond. Cela pourrait n'être qu'une représentation. D'ailleurs, c'en est une.

La trouvaille est sur les deux danseurs, Violetta et Alfredo en costumes squelettes, élancés, beaux et grinçants qui tirent sur les ficelles de ces marionnettes gesticulantes. Bravo à eux, impeccables jusqu'au sublime. Car le reste de la mise en scène est d'une banalité affligeante. Effets de groupe estompés par des décors lourdauds, pas de mise en valeur des voix hors les trois principales. La tragédie ne se joue presque qu'à trois, mais on pourrait, sûrement, compter sur autre chose que les costumes pour la mise en valeur de l'ensemble.
La direction d'orchestre de George Petrou écrase aussi un peu les voix, mais peut-être était-ce, ce jour-là, pour masquer certaines imperfections. Une première pour le chef, une première également pour le ténor Kevin Amiel, bien faible pour ne pas être dominé par la présence de Polina Pasztircsak, bien plus assurée et aguerrie. Dommage, normalement c'est elle, la phtisique, pas lui. J'exagère, mais leurs gabarits n'allaient pas bien ensemble et cela ajoutait à la distance ressentie envers ce drame qui devrait être passionnant. Seul le 3ème acte, centré sur la fin de Violetta, arrivait à nous tirer des larmes. Pour le reste, on n'avait guère de peine.
Germont, endossé par André Heyboer, solide malgré un petit air mafioso dans l'acte II (ou était-ce à cause du pin parasol et du costume ?) et malgré le rôle lui-même, tellement incompréhensible jusqu'au bout, sorte d'empereur venant détruire sous des prétextes fallacieux la vie de celle qui n'avait rien demandé. Et qui peut dire pourquoi il arrive à ses fins ? Des parents de ce style devraient être interdits.

Malgré tout cela, un drame contemporain depuis plus d'un siècle. L'amour, toujours, cassé en deux et jeté aux orties pour des convenances sociales et familiales subies/acceptées par tous. Cet opéra n'a pas pris une ride, malgré Mai 68 et le libertinage ordinaire. A écouter et réécouter, sans cesse et par qui vous voudrez.

Enfin, pour celles et ceux qui trouvent le choeur des bohémiens trop court, en voici un très gourmand.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire