Anesthésiée
par un rhume persistant, j’ai eu envie d’une lecture opportune : Gogol
n’avait-il pas écrit « Le Nez », histoire à se tordre, en forme de
pied de nez à la critique et à la censure puisque l’auteur lui-même finit pas
s’exclamer : « ce qu’il y a de
plus étrange, de plus extraordinaire, c’est qu’un auteur puisse choisir de
pareils sujets… ». De fait, ce nez - ou plutôt cette
« absence » de nez puisqu’il s’agit bien d’une disparition, fort
heureusement temporaire - n’est plus à sa place un matin, réapparaît dans le
petit pain tout chaud préparé pour le petit déjeuner du barbier puis
réapparaît, après avoir été jeté dans la Néva d’en haut du pont, en habit
devant son propriétaire, le major Kolianov, qui ne trouve rien d’autre à faire
qu’à lui courir après dans tout Pétersbourg pour finir par se réveiller le
lendemain avec son nez à sa place.
La
ville de Pétersbourg, justement, est le décor du recueil de nouvelles d’où est
tiré Le Nez. Mais Gogol n’en décrit rien ou presque : des rues sombres,
des lampadaires faiblards, des façades richement éclairées ou d’autres tristes
et boueuses. La perspective Nevski, qui fait l’objet d’une nouvelle (et d’une
adaptation en BD chez Paquet - 2005 – Tommy Redolfi), est vue de manière
double, mais en fait bien plus diverse encore : vue du peintre trop rêveur
qui finit par se tuer d’amour déçu, vue du lieutenant que rien n’atteint, même
pas l’humiliation amoureuse qu’il oublie aussitôt, vues diverses de ceux et
celles qui la parcourent en tous sens, selon les heures du jour ou de la nuit.
Les
autres récits sont tous de la même veine : des histoires un peu
fantastiques, un peu fantasmagoriques, avec des personnages hauts en couleur et
des petits fonctionnaires miteux. Ca faisait longtemps que je ne m’étais
replongée dans la littérature russe, qui d’emblée vous entraîne dans un univers
entre réel et rêve, sans jamais choisir.
« Vous aurez beau dire, des
aventures comme cela arrivent en ce monde, c’est rare, mais cela arrive ».
Gogol
– Nouvelles de Pétersbourg – Folio classique
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